ASSEMBLÉE NATIONALE: Quitus pour la mise en place du Sénat

Le projet de loi organique relatif à l’organisation et au fonctionnement du Sénat a été adopté le mardi 21 mai 2013, en séance plénière par l’Assemblée nationale. 81 députés membres des groupes CDP et CFR ont voté pour, tandis que 46 députés des groupes parlementaires UPC, ADJ et ADF/RDA ont voté contre.
Le vote de la loi organique sur le Sénat a cristallisé les débats pendant 4 heures d’horloge dans l’après-midi d’hier mardi 21 mai à l’Assemblée nationale. Les députés ont tous exprimé leur choix. 107 étaient effectivement présents, et 20 avaient donné des procurations. D’entrée de jeu, le président de l’Assemblée nationale, Soungalo Apollinaire Ouattara, invoquant l’article 92 du règlement de l’hémicycle a rejeté la proposition de mode de vote (par bulletin secret) des députés de l’opposition, représentés par Elysée Kiemdé de l’Union pour le progrès et le changement (UPC). Le vote se fera donc « à main levée ». Les 81 députés membres des groupes Parlementairs, Congrès pour la démocratie et le progrès (CDP) et de la Convention des forces républicaines (CFR) ont voté favorablement. Dans l’autre camp, les députés membres des groupes UPC, Alliance pour la démocratie et la justice (ADJ) et Alliance pour la démocratie et la fédération/Rassemblement démocratique africain (ADF/RDA) ont voté contre le « projet de loi organique portant organisation et fonctionnement du parlement ». Selon le député Yinsbila Christophe Ouédraogo de la Commission des affaires générales, institutionnelles et des droits humains (CAGIDH), qui a présenté le projet, il résulte de la loi no 033-2012/AN du 11 juin 2012, portant modification de la Constitution du Burkina Faso en instituant le Sénat. Le parlement burkinabè devient bicaméral et les deux Chambres sont dotées d’un pouvoir législatif. Ce projet de loi, a-t-il relevé, intervient pour mettre en œuvre les dispositions de la Constitution et préciser les modalités d’élection, de désignation ou de nomination des sénateurs. Il comporte 59 articles répartis en 9 titres. Le Sénat comprend 89 membres. On note 39 sièges de sénateurs représentant les collectivités territoriales, à raison de 3 par région, 4 sièges représentant les autorités coutumières et traditionnelles, 4 sièges représentant les organisations syndicales de travailleurs, 4 sièges représentant les organisations reconnues du patronat burkinabè. Le Sénat comprend en outre 5 sièges de sénateurs représentant les Burkinabè vivant à l’étranger à raison de 2 sièges pour le continent africain, 1 siège pour le continent européen, 1 siège pour le continent américain et 1 siège pour le continent asiatique. 29 sièges de sénateurs sont pourvus par le président du Faso. Pour prétendre à un siège de sénateur, il faut avoir 45 ans révolus et « être de bonne moralité ». De cette loi, on retient également que l’initiative de la révision de la Constitution appartient concurremment au président du Faso, aux membres du parlement (Assemblée nationale et Sénat) et au peuple. La révision peut être acquise par voie de référendum ou par voie parlementaire. Lorsque la voie parlementaire est retenue, le projet ou la proposition de révision doit être voté respectivement par l’Assemblée nationale et le Sénat « en des termes identiques ». Le projet ou la proposition de révision est adopté, s’il est approuvé à la majorité des trois quart (3/4) des membres du parlement en Congrès convoqué par le président du Faso. En cas de vacance de la présidence du Faso pour quelle que raison que ce soit, d’empêchement absolu ou définitif constaté par le Conseil constitutionnel saisi par le gouvernement, cette loi dispose que « les fonctions de président du Faso sont exercées par le président du Sénat. Il est procédé à l’élection d’un nouveau président pour une nouvelle période de 5 ans ». Cette élection a lieu 60 jours au moins et 90 jours au plus « après constatation officielle de la vacance ou du caractère définitif de l’empêchement ». Le président du Sénat exerçant les fonctions de président du Faso ne peut être candidat à cette élection présidentielle.
Le code électoral à la lumière du Sénat
Au cours des débats, les députés de la majorité et du groupe CFR se sont félicité de la mise en place du Sénat qui découle de la Constitution et ont soutenu que le Burkina Faso gagne en termes de renforcement de la démocratie et de la représentativité des différentes couches sociales dans le processus législatif. Pour l’opposition, cette loi pourrait exacerber la situation sociale marquée par la vie chère et différentes revendications. Selon l’ADF/RDA, « le Sénat ne pose pas de problème, c’est sa mise en œuvre ». Ce groupe a également critiqué l’âge minimum de 45 ans requis pour être membre du Sénat alors qu’actuellement en France, l’âge minimum pour être sénateur est fixé à 24 ans. Dans son mémoire en défense, le ministre d’Etat, ministre chargé des Relations avec les institutions et des réformes politiques, Bongnesssan Arsène Yé, a indiqué que, contrairement à des propos véhiculés, le coût du Sénat est de 3 milliards de FCFA dans le budget 2013 de l’Etat. Il ne pense pas que « la paix sociale soit menacée », car ce n’est que l’application de la Constitution. Il reconnaît que toute loi est perfectible et des dispositions comme l’âge minimum requis pour un sénateur peuvent éventuellement faire l’objet de révision ultérieure. Par ailleurs, pour le gouvernement, « la création du Sénat n’est pas liée à une quelconque intention de modifier l’article 37 de la Constitution. Des procédures existent dans la Constitution permettant sa modification ».
Après cette loi sur le Sénat, les députés ont également adopté à 81 voix pour et 46 contre, le projet de loi portant modification du code électoral. Il prend en compte dans le champ d’application du code électoral, l’élection des sénateurs représentant les collectivités territoriales et intègre le président du Sénat comme destinataire du rapport annuel dressé par la Commission électorale nationale indépendante sur l’exécution de ses missions. De plus, les innovations précisent les modalités de l’élection des sénateurs représentant les collectivités territoriales, la durée de leur mandat et les conditions d’éligibilité et d’inéligibilité de ces sénateurs, de même que les incompatibilités liées à la fonction.
Bachirou NANA
Oumoul Djemil LENGANE
(Stagiaire)