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Burkina-Espagne : « La Terre des Hommes intègres», selon Carmel FERRAGUD
COOPÉRATION

L
a semaine dernière nous abordions l’événement qui avait eu lieu à la mairie du village d’Algémesi, située à 35 km de Valence (Est d’Espagne) le 23 février dernier. Il s’agissait de la présentation officielle du projet de complexe scolaire à Baasneeré (région de Kaya. A cet effet, le consulat honoraire du Burkina à Valence avait pris part à ce rendez-vous de solidarité et exprimé la gratitude de l’État burkinabè aux autorités municipales d’Algemesi et à ses habitants qui ne ménagent aucun effort pour soutenir les populations vulnérables de cette localité burkinabè. En sus de la présentation officielle de ce projet cofinancé par la mairie d’Algemesi et ses habitants à travers l’ONG Algémesi Solidari, le second Acte fut la dédicace du livre intitulé en valencien « La terra dels Homes íntegres »* en référence à l’appellation Burkina Faso. Son auteur, Carmel FERRAGUD y étale de long en large son vécu. Entretien avec l’auteur !

Lefaso.net : Qui est Carmel FERRAGUD?

Carmel Ferragud (C.F) : Je suis du village d’Algemesi et sociologue de formation. J’ai enseigné les sciences sociales pendant 12 ans dans un lycée du même village. Pour moi nous devons éduquer les élèves à être des citoyens critiques, capables de prendre des décisions à leur propre compte. Pour cela, nous devons leur donner des outils nécessaires afin qu’ils puissent eux-mêmes faire leur interprétation du monde d’aujourd´hui. Mes cours se focalisaient surtout sur le sous-développement et l’Afrique a toujours occupé une place importante dans mes rendez-vous du donner et du recevoir avec mes élèves. J’ai toujours essayé de démontrer aux apprenants que la situation actuelle de l’Afrique est étroitement liée à une histoire marquée par l’intervention occidentale depuis des siècles, et particulièrement durant les siècles de l’impérialisme aux 19ème et 20ème siècles. C’est cette injustice soutenue par les politiques internationales qui continue de porter préjudice à ce continent tout en rendant difficile son développement. Même si des personnes humaines et morales s’efforcent continuellement à changer la donne, nous devons cependant garder à l’esprit cette dette envers ce continent car le dommage causé à l’Afrique fut terrible. J’ai été sensibilisé pour la cause de l’Afrique sans même y voyager d’abord.

Lefaso.net : De là à écrire un livre sur un pays Africain et plus particulièrement le Burkina Faso, on peut imaginer qu’il y’a eu un parcours au-delà des salles de classe…

C.F : c’est surtout mon étroite relation avec l’ONG Algemesi Solidari qui provoquât cet intérêt d’aller au-delà des salles de classe. L’ONG fut créer par des amis et comme les objectifs étaient nobles, tout de suite mon épouse et moi y avons adhéré. Et plus tard lorsqu’il s’est agi d’effectuer un voyage au Burkina en décembre 2013 dans le cadre d’actions solidaires, j’en ai pris part sans hésiter. Je voulais m’imprégner de la vie en Afrique ; pouvoir parler de la réalité vécue là-bas en première personne. A Baasneeré, en plus du projet pour lequel nous y étions, nous avions apporté également des médicaments, du linge pour les enfants et surtout nous avons socialisé avec les habitants de ce modeste village situé dans la région de Kaya.

Lefaso.net : et quel avait été le domaine d’intervention de Algémesi Solidari lors de ce voyage dont vous parlez et qu’est-ce qui a provoqué ce déclic de l’écriture d’une mémoire ?

CF : Vous savez la santé et l’éducation sont les vrais piliers du bien-être social et du progrès de toute communauté. D’ailleurs, Algémesi Solidari n’intervient que dans ces deux domaines sensibles de l’existence humaine. Exerçant dans l’enseignement, j’ai eu à publier déjà des livres sur la science et la médecine au moyen âge. Mais cette fois-ci le déclic est venu de la sympathie, la fraternité, la chaleur humaine avec lesquelles nous sommes traités à chaque fois qu’une mission de l’ONG s’effectue au Burkina. J’ai beaucoup d’estime et d’admiration pour cette communauté qui vit dans la vulnérabilité sans que cela affecte leur humanisme et leur intégrité. J’ai voulu aussi partager mon expérience avec ceux-là qui vivent en toute commodité et qui semblent ignorer qu’ailleurs des gens vivent sans eau potable et sans électricité (…) que les enfants veulent aller à l’école malgré le manque d’infrastructure scolaire. Il s’agissait pour moi de partager cette expérience éprouvante de mon voyage qui m’a donné beaucoup de richesses immatérielle. Par exemple, lorsque tu fais le tour des villages, des hameaux de culture jonché sur une mobylette et que partout où tu passes on t’offre un coq, des arachides, etc… alors qu’eux-mêmes ne savent pas ce qu’ils vont dîner le soir, cela te laisse perplexe. En même temps tu te sens privilégié de vivre ces moments intenses avec ces hommes et ces femmes loin des circuits touristiques traditionnels.



Lefaso.net : ainsi donc le contenu de votre livre traite de la vie dans un village perdu d’Afrique ?

C.F : pas seulement de mon expérience à Baasneeré. Au fait dans mon livre j’ai voulu expliquer beaucoup de choses. Par exemple j’ai dû faire des recherches complémentaires sur le Burkina et même à partir de l’internet. Cela m’aidât à parler aussi de la généralité sur le Burkina et son peuple ; que j’intercalais avec ma propre expérience tout en démontrant quel type de coopération l’occident doit privilégier dans ces pays en voie de développement. Nous devons toujours garder à l’esprit que c’est à eux de définir et construire leur futur. Nous, nous devons simplement nous mettre à leur service et leur offrir ce que nous avons et ce que nous pouvons.

Lefaso.net : quoi d’autre pour terminer cet entretien ?

C.F : juste dire que je perçois ce livre comme un appel à la solidarité sans frontière ; à découvrir d’autres frères avec lesquels nous partageons cette planète ; un appel à découvrir la terre des hommes intègres. On y tombe réellement amoureux…

Lefaso.net : merci de porter le Burkina Faso dans votre cœur…

C.F : merci plutôt au Burkina de m’avoir adopté comme un de ses fils. Et merci à votre journal en ligne de s’être intéressé à ma personne et à ma modeste contribution qu’est la publication de ce livre. Mon souhait est qu’il provoque l’empathie chez d’autres personnes qui pourraient éventuellement s’associer aux institutions caritatives pour contribuer à améliorer les conditions d’existence des peuples qui souffrent en silence et dans la dignité.

Lefaso.net
Entretien réalisé et retranscrit
Par Roland ZONGO SANOU, Correspondant en Espagne


*Pour plus d’information sur le livre, aller sur : www.algemesisolidari.org